LA SORCELLERIE A MBANDAKA
Deux vieux éméchés se disputent dans une paillote qui sert de bar de fortune. Je vais te manger, dit l'un ! Tu verras cette nuit, rétorque l'autre. Je suis estomaqué. A Brazzaville, il y a longtemps que ces kokobars auraient été brulés vifs au pneu Tubeless. Mais cette scène se passe dans un village proche de la ville de Mbandaka, en RDC. Un village habité majoritairement par le peuple mongo dont les femmes sont réputées être de vraies chaudasses libidineuses. Bref... Les deux sorciers sont toujours en train de se chamailler quand je pars me coucher.
Le lendemain matin, ma daronne m'annonce que l'un des protagonistes, le vieux Issato, est décédé. Je ne suis pas surpris vu les énormes quantités de lotoko qu'il ingurgitait. Mais elle me force à croire que c'est son ennemi de la veille qui a eu raison de lui. Après l'émotion, tout le village vaque à ses occupations et se rend aux champs, moi aussi d’ailleurs. Le lendemain, je fais pareil. Je constate juste que je suis seul en route. C'est le vide total. A mon retour, tout le village me regarde bizarrement. Ça murmure en mongo. On ne me dit rien.
Le troisième jour, je prends la route des champs, c'est toujours vide en route. Pas une seule ombre qui vive. Ce qui me rassure c'est que dans le champ voisin, j'entends du bruit, un homme en train de crier. Je me dis encore un qui a trop forcé sur le lotoko. A mon retour, ma daronne, son mari et quelques villageois viennent m'attendre à l'entrée du village. Je demande ce qui se passe. Une villageoise apeurée m'explique en mongo. Je comprends que dalle. Ma daronne traduit : le vieux sorcier mort fait des apparitions mystiques à tous ceux qui partent aux champs. Il est très fâché que des gens partent aux champs au lieu de se recueillir auprès de sa dépouille mortelle. Donc gare à celui qui osera "le manquer". Elle rajoute : depuis deux jours, plus personne ne sors du village. Je riposte : ce n’est pas vrai car depuis deux jours, j'entends le propriétaire du champ d'à côté faire du bruit. Ma mère traduit aux villageois. Ces derniers, toujours affolés baragouinent je ne sais quoi. Ma mère traduit : Le propriétaire du champ d'à côté, c'est justement le gars (vieux Issato) qui est mort et ces enfants sont tous à son chevet depuis son décès. C’était lui qui te criait dessus. Tu as de la chance de ne pas comprendre cette langue. Là, je commence à flipper pour de vrai. Tout le monde s'en rends compte. Quelqu'un suggère d'aller demander pardon auprès du macchabée. Un autre me demande : demain, tu repars aux champs ? C'est ma mère qui s'est chargé de répondre à ma place.
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